Je veux gagner (bien) ma vie!
Les artistes sont-ils vraiment condamnés à être pauvres ?
S'il est une profession dans laquelle il est fréquent de rencontrer des gens qui ont du mal à « joindre les deux bouts », c'est bien celle d'artiste. Pire, dans notre inconscient collectif, la pauvreté fait même partie des attributs de ces derniers. L'image romantique de l'artiste affamé, vivant dans une mansarde crasseuse, luttant pour sa passion et condamné à la pauvreté, est profondément enracinée dans notre culture. De nombreuses icônes de l'histoire de l'art viennent d'ailleurs confirmer cette notion que créativité et misère semblent aller de pair.
Tout naturellement, j'ai moi aussi adopté pendant des années cette posture sans la remettre en question. Sous prétexte que j'exerce ma passion et parce que je suis comme nous tous imprégnée de ces images d’Épinal mais aussi de dogmes judéo-chrétiens (le plaisir à un prix), j'ai tout naturellement accepté de galérer comme on dit.
Mais qui a donc décidé qu'être artiste rime avec pauvreté ?
Pour comprendre cette situation, il est essentiel de remonter dans le temps. Pendant des siècles, les créateurs ont souvent été considérés comme des artisans travaillant sur commande pour des clients fortunés. Même s'ils côtoyaient les plus grands de ce monde, les artistes gardaient un statut social généralement bas et leur rémunération était souvent insuffisante pour maintenir un niveau de vie confortable. De plus, même célèbres et en dépit de leur immense talent, certains ont connu des périodes de grande précarité. Ces exemples ont indéniablement contribué à cette idée que l'artiste devrait être condamné à une vie de pauvreté tout en étant dépendant du bon vouloir des puissants.
Rompre le sort
Ce constat historique et culturel posé, sommes-nous pour autant voués à courber l'échine sans espoir de faire évoluer notre condition ?
J'ai pour ma part décidé de renverser la vapeur pour exercer un métier qui me passionne tout en gagnant ma vie. Et lorsque je parle de gagner ma vie, je parle de gagner bien ma vie.
Exit les calculs savants pour pouvoir payer le loyer, les factures et acheter un matériel onéreux et nécessaire à ma création !
Je veux voir grand, je veux pouvoir travailler dans de bonnes conditions, voyager, m'offrir de belles formations, coachings...
Bref, je veux pouvoir être artiste ET vivre dignement. Tout simplement.
Nous ne sommes pas condamnés !
Je ne suis pas condamnée !
Les artistes sont des entrepreneurs comme les autres
Et si nous cessions d'attendre que la société reconnaisse l'utilité des artistes et que nous prenions notre destin en main ?
J'entends souvent des acteurs de notre secteur dire que l’État ne fait assez, qu'il devrait y avoir plus d'aides. Très bien, pourquoi pas, mais cela ne doit pas nous dégager de notre responsabilité. Je crois en effet que nous devons devenir des entrepreneurs à part entière car nous sommes des acteurs économiques comme les autres. Nous vendons notre art à des clients, c'est aussi simple que cela !
Cette posture nécessite bien entendu de désacraliser la chose artistique. Car soyons honnêtes, même si notre apport au monde est important, il n'a rien de si éthéré qu'il ne soit pas possible de parler d'argent à son propos. D'ailleurs les stars contemporaines comme Koons, Murakami ou Hirst en font la parfaite démonstration. Certains diront que ce n'est plus de l'art mais mon propos n'est pas là. Quoi qu'on pense d'eux, ils sont la preuve qu'art et argent peuvent faire bon ménage, très bon ménage même.
Je suis responsable !
L'histoire des artistes est donc celle d'une grande dépendance vis à vis des puissants d'autrefois, et aujourd'hui des institutions, galeries ou organisateurs de salon.
Mais nous pouvons décider, je décide que je ne suis plus subordonnée à qui que ce soit. Parfois je collabore avec des galeries mais je reste maître de mon art car j'ai le pouvoir de le promouvoir et le vendre par moi-même.
Et j'ai beaucoup de chance car je bénéficie pour cela d'outils modernes qui facilitent la vie. Je veux bien entendu parler d'Internet et des réseaux sociaux qui ont considérablement augmenté notre capacité à impacter le monde avec notre travail. Ces derniers ont parfois mauvaise presse mais ils sont des outils incroyables dont il convient de se servir. Et pour cela, nul besoin de se vautrer dans une marée exhibitionniste, certainement pas. Il s'agit juste d'user des possibilités offertes avec intelligence et professionnalisme.
Notre marché s'est donc incroyablement élargi en nous permet d'atteindre des clients à l'autre bout du monde.Quel incroyable aubaine ! Pourquoi s'en priver ?
Alors, évidemment, cela suppose que je dois sortir de la posture d'artiste maudit pour endosser le costume, le tailleur devrais-je dire, d'entrepreneure responsable. Fini la procrastination, fini l'administratif et la compta mis de coté sous prétexte que je suis artiste et que je n'y connais rien ! Je m'empare de ces taches rébarbatives comme tout autre entrepreneur. J'embrasse aussi pleinement l'idée que je peux communiquer et utiliser des outils de marketing sans me compromettre.
Oser parler d'argent
Je décide aujourd'hui de devenir une entrepreneure responsable. Responsable de mon activé et de mon message d'artiste. C'est un engament qui me demande d'être pleinement dévouée à mon métier mais surtout de ne plus avoir peur de parler d'argent.
Car l'argent quoi qu'on en pense, et jusqu'à preuve du contraire, reste le maître du jeu en ce bas monde. Pourquoi m'interdirais-je de prendre ma place pour bénéficier des richesse qu'il offre dans la grande pièce de théâtre qu'est la vie ?
Il y a quelques semaines je regardais une vidéo sur Instagram qui disait « et si tu laissais tes œuvres être achetées ? ». Ce que l'auteur de la vidéo évoque là est très subtil. Cela à avoir avec une énergie qu'on développe ou pas dans notre métier et autour de nos œuvres. Il a bien entendu reçu la volée de bois vert de circonstance de la part de ceux qui pensent que ce n'est pas si facile. Rien d'étonnant car les artistes sont si nombreux à porter de façon inconsciente la croyance qu'ils ne sont pas en capacité de vivre décemment de leur art que leur façon d'être et agir les empêche d'accéder à l'abondance.
Nous pouvons nous raconter tout un tas d'histoires sur la connexion au Divin lorsque nous créons (je le crois profondément) mais sorti de l'atelier, notre travail doit être honoré d’une énergie conquérante pour être reçu par le monde. Et, quoi qu'on en pense, cette énergie transite par les choses bassement terrestres que sont l'argent et le marketing.
Forte de cette conviction qui balaie l’encombrant héritage de l’artiste maudit j’aborde donc une nouvelle ère dans ma vie. C'est un apprentissage difficile et exigeant qui me demande de sortir de la fameuse zone de confort. Mais c'est le prix à payer si je veux m’extraire d'un schéma qui ne me convient plus. J'ai compris que je ne peux pas continuer à faire les mêmes choses qui produiront immanquablement les mêmes effets.
« La folie, c'est de faire toujours la même chose et de s'attendre à un résultat différent ». Merci Einstein !
Rien ne me garantit de réussir si ce n'est mon envie d'essayer, dans la joie retrouvée de la création après des années difficiles mais surtout dans la croyance que rien ne m'est interdit, y compris de réussir une belle vie d'artiste !
Tant d'autres l'ont fait, pourquoi pas moi ?
Pourquoi pas vous ?