Corinne Héraud

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Les NFT : un nouveau marché, vraiment ?

Depuis quelques mois (et je sais que je ne suis pas la seule), je suis littéralement harcelée sur les réseaux sociaux par d'obscures propositions de mise en vente de mon travail d'artiste via les NFT. Comme nombre d'entre vous, j'ai balayé consciencieusement tout cela d'un revers de main. Je ne suis pas née de la dernière pluie et j'ai appris depuis longtemps à me méfier des trop belles offres !
Mais, parce que je suis curieuse et que j'aime surtout me faire ma propre opinion sur des sujets parfois très polémiques, j'ai décidé de m'y intéresser. C'est un milieu et une technologie desquels je suis objectivement très éloignée et m'attaquer à ce sujet n'a d'autre ambition que d'y voir un peu plus clair pour me faire un avis aussi objectif que possible.

Alors qu'est-ce qui se cache derrière ces NFT ?
Quelle est donc cette odeur de souffre qui entoure la question des NFT ?

Connaître les termes.

Pour se familiariser avec cet univers, il est important de donner un sens à deux termes essentiels lorsqu'on parle de NFT. La blockchain et les NFT précisément.

Concrètement, la blockchain est un réseau dans lequel les données ne sont pas stockées en un seul endroit, mais réparties sur de nombreux ordinateurs à travers le monde. La blockchain est donc une technologie qui permet de stocker et de transmettre des informations de manière transparente, sécurisée et sans organe central de contrôle, ce qui la rend particulièrement adaptée pour des applications telles que les cryptomonnaies par exemple. Cela rend théoriquement le système résistant à la censure et aux pannes centralisées (c’est d’ailleurs ce qui a prévalu à sa création en 2008 avec la première application concrète d’une blockchain inventée par Satoshi Nakamoto avec le bitcoin.). Par ailleurs, une fois qu'une transaction est enregistrée dans la blockchain, elle ne peut plus être modifiée ou supprimée. C'est ce qui assure l'intégrité et la traçabilité des données.

Les NFT, ou "Non-Fungible Tokens" (jetons non fongibles en français), sont des actifs numériques uniques représentés sur la blockchain. Ils peuvent être achetés ou vendus grâce aux cryptomonnaies. Un NFT n'est à l'origine qu'un certificat d'enregistrement d'une opération sur la blockchain. Ce qui le caractérise principalement c'est qu'il est non fongible. En clair, cela signifie que chaque NFT est unique et ne peut être échangé à l'identique, contrairement aux monnaies courantes ou aux Bitcoins qui sont eux des actifs fongibles. Le très grand intérêt des NFT est donc qu'ils permettent la possession numérique d'un bien. Cela peut être une œuvre d'art numérique , un objet de collection, un élément de jeu vidéo, un algorithme ou même un contrat d'assurance. L'acte de propriété est enregistré sur la blockchain, ce qui assure son unicité, son authenticité et son historique de propriété.

Ces définitions posées, passons au cœur du sujet.
Les NFT ont-ils réellement un intérêt pour les artistes ?

De réelles perspectives...

Tout d'abord, la vente d’œuvres via les NFT concerne en priorité les artistes produisant des œuvres digitales : photographie, vidéo, créations numériques, sculptures 3D, créations du métavers... En effet ces dernières ont davantage vocation à être échangées sur la blockchain via les NFT que des œuvres plus traditionnelles comme les peintures ou les sculptures par exemple. Cette technologie est friande d'animations et de réalités virtuelles rendues possibles par les technologies du numérique. Cela étant, rien n'interdit de monétiser une toile ou un sculpture réelles. Il suffit de trouver acquéreur parmi des usagers qui ont tendance à se tourner vers l'innovation !

L'avantage le plus évident des NFT pour les artistes réside dans la monétisation et la certification de leurs œuvres sans intermédiaire. Grâce à la technologie blockchain, chaque œuvre numérique peut être authentifiée de manière unique, ce qui garantit sa provenance et son unicité. Cette transparence et cette sécurité sont révolutionnaires. En effet, la technologie de la blockchain permet d’estampiller des fichiers numériques d’un marqueur d’authenticité impossible à falsifier.
Les NFT garantissent ainsi la propriété intellectuelle d'une œuvre à l'échelle mondiale, ce qui est tout à fait nouveau.
Évidemment, créer et mettre en vente des NFT a un coût qui peut aller de quelques dollars à plusieurs centaines de dollars, principalement en raison des frais d'inscription et de création sur les blockchains. Cela offre néanmoins aux artistes un contrôle sans précédent sur la distribution et la commercialisation de leur travail, tout en protégeant leurs droits d'auteur.

Mais aussi beaucoup de dérives !

Bien entendu, les NFT ne sont pas que paradis ! Loin s'en faut!
La spéculation intense qui a eu lieu ces dernières années a d'ailleurs contribué à fabriquer une terrible réputation aux NFT. Ce qui n'était à l'origine qu'un certificat d'enregistrement d'une opération avec la blockchain est devenu un produit hyper spéculatif. Le pire a été fait dans le simple but de générer des profits parfois indécents. Si le tout premier NFT a été enregistré en 2014, c'est en 2021 que la marché a littéralement explosé. Pendant deux années folles (2021 et 2022) certains ont réussi ce qu'on peut appeler de très gros coups. A titre d'exemple, Le NFT le plus cher, s'est vendu pour la coquette somme de 91,8 millions de dollars en décembre 2021. Il s'agit de l'œuvre “The Merge” de l'artiste Pak. Un chiffre parmi tant d'autres qui ont donné le tournis à de nombreux artistes qui ont cru entrevoir la possibilité d'un nouveau marché plein de promesses.
Ils sont malheureusement devenus les proies faciles d'un système hautement spéculatif avec des investisseurs crédules tombant dans le piège d'escroqueries bien orchestrées. Ce dévoiement des NFT a bien entendu suscité des inquiétudes légitimes et entaché lourdement la réputation de ce marché si prometteur.

Un enjeu écologique aussi

Mais un autre débat gravite autour du marché des NFT. Celui qui repose sur le fait que les IA génératives comme Midjourney ou Dall E sont venues se nourrir de la masse de fichiers numériques liés aux NFT. Il faut savoir à ce stade que la création d'un NFT nécessite la mise en ligne d'un fichier haute résolution dont les IA génératives ont besoin pour construire leur savoir-faire. Ces derniers sont ainsi devenus une partie de la base de données grâce à laquelle les IA fonctionnent aujourd'hui. Certains diront que la propriété intellectuelle d'une œuvre n'est donc pas réellement garantie par le système NFT sans compter que les artistes ayant créé des NFT n'ont sans doute jamais été informés que leurs fichiers pouvaient être « absorbés » par les IA génératives. Vaste débat!

Quand les IA s'en mêlent

L'empreinte écologique des NFT est également pointée du doigt par les détracteurs des NFT. Il est très difficile à mon niveau d'accéder à des chiffres fiables concernant les émissions de CO2 des blockchains. Il convient néanmoins d'établir une mise en perspective sur ce sujet en les comparant à la consommation énergétique globale du secteur financier international (estimée à plusieurs centaines de térawattheures chaque année). Les plate formes de NFT affirment être désormais sensibles à la question et entreprennent de réduire leurs émissions grâce à l'utilisation de blockchains plus écologiques.


Vers des NFT plus sûrs ?

Vous l'aurez compris se lancer dans la création de NFT demande une certaine connaissance des pièges à éviter et pose également quelques questions. Mais faut-il vraiment jeter le bébé avec l'eau du bain ?
Le marché qui s'était emballé dans un premier temps semble entrer désormais dans une phase de structuration salvatrice. Bien sûr, les chiffres relatifs aux nombre et à la valeur globale des NFT échangés se sont affaissés car le mouvement spéculatif s'est effondré. A l'instar de la finance conventionnelle qui n'a pas disparue avec la crise des subprimes, les NFT (et leur intérêt) n'ont pas disparus avec la fin de l'envolée spéculative des dernières années. On peut même dire que, revenant à la raison, le marché se structure autour de plate formes réellement dédiées aux œuvres d'art avec des projets de croissance plus solides.
C'est le cas de la plate forme française Divenci. Conçue spécifiquement pour les artistes, les collectionneurs et les acteurs du monde de l'art, Divenci est un projet  international et une plate forme qui n'est pas limitée à un marché franco-français.
Son fondateur, Frédéric Steimer nous présente Divenci comme une plate forme d'authentification et de certification permettant aux artistes, aux créateurs quelle que soit leur forme de création ou d'expression, d'utiliser la Blockchain pour certifier à vie l'authenticité et la paternité de la pièce qu'ils ont réalisée ou de leur droit de propriété. Ils peuvent ainsi sécuriser leurs œuvres (physiques et numériques) en les enregistrant et en les traçant. S'ils le souhaitent, ils peuvent également les monétiser, les exposer, les vendre et en gérer les droits (avec des licences d'exploitation par ex.).

Fréséric Steimer nous assure que la vocation de Divenci est de simplifier la création et la gestion de NFT tout en mettant l'accent sur l'éthique et la durabilité. Pour quelques centimes seulement, les artistes français et étrangers peuvent ainsi accéder à cette nouvelle manière de créer et vendre leurs créations, en toute sécurité.

Pour conclure...

Même s'ils concernent plus particulièrement les œuvres numériques (mais pas seulement), les NFT sont à l'évidence une avancée majeure pour le monde de l'art. Les opportunités existent encore, peut-être même plus que jamais dans la mesure où la spéculation folle s'est désormais éteinte. Il convient bien entendu de rester vigilant et de choisir des plate formes sécurisées qui proposent un véritable projet autour de l'échange d’œuvres d'art.
Il reste bien entendu la question plus éthique liée la consommation d'énergie. Même si les plate formes de NFT s'efforcent désormais de réduire leur empreinte carbone, cette problématique nous renvoie à notre responsabilité individuelle. Ainsi, plus que la dénonciation sans nuance, il me semble que la solution devra venir d'une prise de conscience globale couplée à la mise en place d’habitudes vertueuses à l’échelle individuelle. C'est un peu le cas de tous ces sujets liés à l'écologie pour lesquels il s'agit de construire une intelligence globale.

Enfin, pour ce qui concerne le pillage des fichiers par les IA, j'ai dans l'idée que ces dernières n'ont pas attendu la généralisation des NFT pour fabriquer la base de leur « intelligence ». Tous les fichiers qui transitent aujourd'hui sur les Internet, qu'ils soient en haute ou basse définition, ont aussi largement contribué à cela depuis des décennies maintenant. Pour ma part, j'estime que c'est un débat qui est déjà largement dépassé tant les IA ont progressé.

Alors NFT, ou pas NFT ?

Personnellement, cette plongée dans l'univers des NFT m'aura appris que, comme bon nombre de sujets très polémiques, il convient « d'enquêter » un peu avant de pouvoir se faire une opinion. Je perçois désormais que les possibilités existent très certainement. A l'instar des IA qui ont déferlé dans nos vies depuis quelques années, il me semble vain de contester leur existence. C'est un peu le sens de l'histoire des progrès technologiques qui ont marqué l'histoire de l'humanité.
Je ne suis évidement personne pour dire que cela est bien ou mal, simplement j'observe le caractère inéluctable de ces mouvements. Certains les embrassent, parfois naïvement. D'autres les refusent, parfois dogmatiquement... On peut ainsi choisir de rester à l'écart mais on peut également décider de suivre plus ou moins le mouvement. C'est une question de choix personnels.

Mon travail ne se prête pas véritablement à la création de NFT, mais je ne dis pas que je ne choisirai jamais de jouer dans cette nouvelle cour de (ré)création, pour le plaisir d’expérimenter car, vous savez quoi ? J'adore ça !

Et de votre côté, que pensez-vous des NFT ?
Peut-être avez-vous déjà tenté l'expérience ?
Êtes-vous tenté ou au contraire totalement réfractaire ?


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